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Photo du rédacteurfrédéric Bonnet

Du nouveau sur "Le trou du curé"



Dans un précédent article, nous vous avons présenté "Le trou du curé", ce refuge qui pendant la révolution abrita des nobles et des ecclésiastiques des révolutionnaires qui étaient à la recherche des réfractaires et des opposants royalistes. Nous terminions notre article sur la question de l'identité et l'histoire de ces réfugiés. 


Nos recherches nous permettent de vous apporter quelques éclaircissements à ce sujet. Ils se basent sur le travail réalisé par une historienne Mathilde Bellaud-Dessalles (naît le 11 août 1859 à Béziers) dont nous reparlerons parfois car elle a écrit un long et passionnant livre "La foret d’Anglès et le château d’Espine - 1926" où elle parle abondamment du plateau du Sommail et de la commune du Soulié.

Dans ce livre, elle détaille l'histoire du "trou du curé" et précise qui étaient les réfractaires cachés. Nous vous livrons l'intégralité de ce passage qui nous parle de Jacques Louis David de Seguin des Hons (originaire de Malbosc). Vous remarquerez que le coeur de Mathilde Bellaud-Dessalles penche nettement en direction de ces contre révolutionnaires...


Les réfugiés du trou du curé par Mathilde Bellaud-Dessalles


Jacques Louis David de Seguin des Hons, né en 1760, de Jacques Louis Alexandre et d’Elisabeth Blanche de Thomas de la Barthe, avait fait ses études au collège de Sainte-Barbe et terminé en Sorbonne sa théologie. Chanoine au Chapitre de Saint-Pons, puis vicaire-général de Monseigneur d’Usson de Bonnac, — le premier des prélats qui s’étaient présentés à la tribune de la Constituante pour voter contre le serment à la Constitution, — David de Seguin imita son évêque et à la proclamation de la loi du 20 mai se réfugia en Espagne. On trouve son nom sur la liste des ecclésiastiques et religieux embarqués au port d’Agde pour Barcelone, conservée aux Archives de l’Hérault. Là, il eut dit-on, d’affectueuses relations avec l’archevêque d’Auch, Monseigneur de la Tour du Pin Montauban, et effectua avec lui le pèlerinage de Notre-Dame de Montserrat. Rentré en France malgré la surveillance très étroite des côtes, il vint se réfugier sur le Sommail, non loin de ce Malbosc, berceau de son enfance, avec deux autres émigrés, l’abbé Pontier et le baron de Carayon-Latour. La cachette préférée de ces proscrits était située sur la rive gauche de l’Arn, dans les roches granitiques qui s’élèvent comme une falaise dans les bois du domaine du Pont. Ce n’est pas sans émotion que l’on visite l’étroit refuge d’un accès difficile, entouré de vieux hêtres, balayé par tous les vents, où ces confesseurs de la Foi abritaient leurs jours précaires. A l’imitation des premiers chrétiens, plusieurs habitants du pays venaient leur porter chaque jour un peu de nourriture ; parmi eux, la famille Courrech, originaire du Soulié, se signala par des actes véritablement héroïques, car il y allait de la vie. 

Plus tard, édifiée par ses soins, une plaque commémorative dont nous parlerons tout à l’heure, rappellera la constance des victimes et le dévouement de leurs consolateurs.


Cependant la retraite de Louis David était soupçonnée. On était alors dans cette période particulièrement désastreuse qui commencée au 19 fructidor an V (5 septembre 1796), prit fin au 18 brumaire, et qu’on a appelée la Seconde Terreur. De nouvelles lois ramenaient les insermentés aux jours les plus sombres. « Jamais, a écrit Saurel, les confesseurs de la Foi ne furent poursuivis avec plus de fureur ». Traqué par la gendarmerie, dans les rochers de la Montagne, le futur évêque de Troyes fut arrêté et conduit à la maison de détention à Montpellier, le 19 brumaire an VI. 


Nous n’avons aucun détail sur cette réclusion, mais elle dut prendre certainement fin à l’amnistie qui suivit le 18 brumaire. On retrouve Louis David, au rétablissement du culte, vicaire-général d’Albi. Appelé plus tard à l’évêché de Troyes, il fut sacré, le 26 février 1826 et occupa ce siège jusqu’à sa mort, survenue le 31 août 1843. 


A notre prière, Monseigneur l’évêque de Troyes a bien voulu nous faire communiquer par son secrétaire M. le Chanoine Labbé, l’exemplaire, assurément fort rare, conservé aux Archives de l’évêché, de l’Oraison funèbre de Monseigneur des Hons prononcée quelques jours après sa mort. L'orateur ne semble malheureusement pas avoir eu connaissance des épisodes de la vie de son héros qui auraient prêté à de si beaux effets oratoires. Passant, sans s’y arrêter, sur les années tragiques de la Révolution, il célèbre avec une simplicité qui n’exclue pas l’éloquence, les éminentes vertus du défunt : sa pénétration, sa bonté « qui n’acheva jamais d’éteindre la mèche qui fumait encore », sa prudence, sa déclamation simple et persuasive. Il rappelle le dévouement prodigué par l’évêque pendant une épidémie de peste, son empressement à se rendre successivement dans la chaire de toutes les églises de Troyes pour consoler ou rassurer ses ouailles. Il énumère enfin, les œuvres fondées par ses soins : le Petit Séminaire, les Sœurs de la Providence à Troyes et à Arcis-sur-Aube, un asile d’Incurables et des Ouvroirs. Sa dernière maladie fut longue et cruelle. Tombé dans une sorte d’anéantissement, il resta au milieu des souffrances toujours calme et patient. Il mourut en bénissant son clergé alors que l’on venait de lui administrer les Derniers Sacrements. Dans une Lettre pastorale adressée quelques jours plus tard au Clergé du Diocèse de Troyes, l’évêque de Chalons, louait la beauté de la cérémonie des funérailles, l’immense concours de peuple, où, militaires, magistrats, dignitaires de toutes les classes avaient rendu hommage aux vertus de Monseigneur des Hons. 


En 1858, alors que les cendres de l’évêque de Troyes reposaient depuis vingt-cinq ans sous les voûtes de sa cathédrale, les trois frères Courrech et leur sœur Rosalie, se souvinrent du prêtre traqué et fugitif qui par leurs soins, avait échappé à la mort par la faim, dans les rochers de la Montagne. Ils firent graver et placer sur la paroi de granit témoin de leur courage et de leur dévouement, cette inscription dont la rédaction naïve, ajoute à l’émotion que provoque cet humble ex-voto de fidélité :


PENDANT LES TOURMENTES RÉVOLUTIONNAIRES SOUS CES ROCHERS ALORS ENTOURÉS D’ARBRES TOUFFUS, TROUVAIENT UN ASILE TOUJOURS SUR DEUX HONORABLES PARENTS ET UN VÉNÉRABLE VOISIN, TOUS CHERS A NOTRE FAMILLE. MM. PONTIER, MORT, CURÉ DE SERVIES. TARN. LE BARON DE CARAYON LATOUR, MORT, RECEVEUR GÉNÉRAL DE BORDEAUX. MGR DESHONS, MORT,ÉVÊQUE DE TROYES. MONUMENT ÉLEVÉ A LEUR MÉMOIRE PAR JACQUES, SILVÈRE, FRANÇOIS ET ROSALIE COURRECH, FRÈRES ET SŒUR CHACUN DES QUATRE AGÉ DE PLUS DE 71 ANS. PRIEZ POUR TOUS 1858 (20 mars)



Voici donc un extrait qui nous éclaire sur "Le trou du curé" est les circonstances qui en firent sa modeste célébrité.


Concernant ce dossier, il importe de citer amplement le travail de recherche réalisé par Monsieur Daniel GROS développé dans son ouvrage "Essai historique sur la commune de Le Soulié - 1960" Collection "Mémoire de la montagne du Haut Languedoc Héraultais".

Monsieur Gros nous donne quelques précisions suivantes : "Mgr des Hons, l'un des prêtres, descend d'une vieille famille, propriétaire depuis longtemps du château de Malbosc. Même durant la période révolutionnaire, l'abbé des Hons, alors vicaire général à l'évêché d'aven, continue au prix de bien des dangers, à exercer le saint ministère de nos montagnes."


Chers lecteurs, au travers de cette narration, vous vous rendrez compte que notre petit pays si loin de tout a aussi été marqué par la grande histoire. Dans de prochains articles, nous reviendrons sur cette période en nous appuyant sur le travail d'historiens ou narrateurs comme Mathilde Bellaud-Dessalles, Daniel Gros, l'abbé Azaïs et d'autres, afin d'éclairer d'un jour nouveau l'histoire du Sommail et du Soulié mais aussi de rendre une belle place à ceux et celles qui, à différentes époques, ont cherché et se sont intéressés à l'histoire de notre région permettant en cela de transmettre la mémoire et les connaissances. Merci à eux.

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